VISITE
D'UN « BOUGE » MELESSIEN
Après vous avoir fait participer à la première élection municipale de la commune en 1790, nous vous invitons à entrer dans le « bouge » ou habitation de ferme de Gilles Ridard, premier citoyen-maire de Melesse.
A
cet effet, nous disposons d'un descriptif complet de la pièce principale ou
pièce à vivre, dans l'inventaire établi à son décès. Le 10 septembre, 4 jours après sa mort, Julien Moulin, le
greffier de la seigneurie et juridiction du Plessix-Melesse se déplace aux
Alleux dont dépend la terre. Selon l'inventaire le greffier appose les scellés
aux armes de la seigneurie sur certains meubles et le lecteur est surpris
d'apprendre que Gilles Ridard a le statut d'« étagier » (c'est à dire vassal).
L'ancien régime social a été aboli dans l'enthousiasme la nuit du 4 août
1789. Des décrets ont supprimé la dîme,
les servitudes personnelles et les droits féodaux, mais les paysans doivent
racheter ces derniers à leur seigneur, moyennant une indemnité fixée par la
loi. C'est à partir de septembre 1791 qu'une nouvelle administration voit le
jour par la mise en application d'une Constitution.
Lors
de sa venue dans le « bouge », le greffier rencontre :
Jeanne Robert, la femme de Gilles Ridard,
Julien et Anne Ridard, les enfants mineurs du défunt, âgés de plus de 23 ans (rappelons que l'âge de la majorité est de 25 ans).
Le procès verbal de l'inventaire renseigne sur le mode de vie rural au 18ème siècle : les vêtements, les outils, les ustensiles ménagers, les meubles...
Amusez-vous que vous rappellent les objets listés ci-dessous ? (nous avons conservé l'orthographe de l'époque) :
- une tuile - une baratte avec sa bouette et - un boucard
- une gresse à galette - son ribot - un travouer de bois
- un troipied - une huge - un rouet à filer
- une harassoire - une met à paistir - une civière
- une cuve d'airan pour faire la buée - un charnier - une sercle à tailler le
- un rangeot - une coueffe landier
- une tranche à guéret…
1 - La cheminée, avec ses deux crémaillères et ses ustensiles de cuisine (trépieds, tuile, tournette, broches, pinces et pelle à feu, grille et chaudron) contient « un petit coffre sur quoi on s'assiet, lequel ouvert il s'y est trouvé environ une douzaine de fuseaux de rouets, dont il y en a deux qui sont remplis de fils bruns, et plusieurs haillons de nulle valeur... au manteau de la cheminée, il s'y trouve un fusil avec sa baïonnette et baguette de fer, trois chandeliers dont il y en a un de fer blanc et les deux autres de cuivre, une poudrière de fer blanc... »
2 - 7 - 13 - Les deux lits proches de la cheminée sont en bois de cerisier avec une carrée (plafond de bois) à laquelle sont suspendus un tour de lit et des rideaux de serge verte. Il s'agit donc très certainement de lits à colonne, modèle le plus répandu à cette époque dans la région de Rennes. A noter que la couleur verte des rideaux de lits, symbole de fécondité, est également la plus fréquente dans les intérieurs ruraux. Le troisième lit (n° 7) est d'une structure identique mais en bois de châtaignier avec des rideaux de laine grise. Chaque lit est garni d'une couette de «plumes d'oye » , de deux « draps de lit de brin et liture » de deux ou trois oreillers avec leurs taies, d'une ou deux couvertures de laine blanche.
3 - 14 - Les bancs-coffre « au proche du lit » contiennent essentiellement des couvertures usagées et de vieux vêtements.
4 - Le prie Dieu, fermant à clé, recèle un peu d'argent (10 livres). L'officier en confie la clé à Julien RIDARD, fils du défunt.
5 - « Une grande armoire de bois frazier (cerisier) fermant à deux battants avec clé et claveuse, laquelle ouverte il s’y est trouvé les hardes de linges à l'usage du défunt Gilles RIDARD sur laquelle armoire et anneau j'ai apposé le sceau et arme de cette seigneurie, et de la clé je me suis saisi après avoir ramassé toutes les hardes de linge qui ne sont point à faire la buée » (la lessive).
6 - Une petite armoire en cerisier n'ayant qu'une porte fermant à clé, avec un tiroir dans le bas. Elle contient le linge de Julien RIDARD qui en détient la clé.
8 - Le « dressoir en bois de noyer fermant à quatre battants et deux claveuses » contient la vaisselle du ménage et un peu de nourriture : nous vous laissons le soin d'en déchiffrer le contenu précis :
9 - C'est Jeanne ROBERT qui détient la clé de cette armoire à deux portes. Elle
contient la lingerie du ménage et les vêtements de la veuve : 19 chemises, 7 tabliers d'indienne ou de toile, 5 corsets, 3 jupes de laine brune, quatre douzaines de coiffes ....
10 - « Une horloge avec sa caisse de bois » dont la présence constitue un signe indiscutable de l'aisance du défunt. En effet, en cette fin du XVIIIème siècle on ne recense une horloge que dans un intérieur paysan sur vingt.
11 - Cette armoire à deux portes, également en cerisier, est celle d'Anne RIDARD qui en détient la clé et y range son linge.
12 - « Une petite table carrée avec un tiroir, lequel ouvert il s’y est trouvé quelques papiers concernant la municipalité ». On peut donc imaginer qu'elle servait de bureau de travail au défunt maire.
15 - « Une grande table de bois de cerisier, avec deux tirettes lesquelles ouvertes il s’y est trouvé huit galettes, une salière de faïence, une gresse à galette. »
16 - Deux bancelles accompagnant la table
17 - « Une table ronde au proche du foyer avec un tiroir y étant au bas, fermant à clé et claveuse » et contenant divers ustensiles de cuisine
Pour autant qu'on puisse la reconstituer, la disposition d'ensemble de ce mobilier obéit aux usages de l'époque : les lits sont placés aux angles de la pièce, afin de préserver l'intimité ; les armoires sont alignées le long des murs ; la table, les bancelles et le dressoir sont placés dans l'axe central du foyer.
Association d'histoire
« Melesse à travers les Ages »
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