A l'aube du XIXème siècle, l'activité du pays de Melesse est essentiellement agricole et le travail de l'artisanat en est dépendant ; l'industrie n'y est pas présente, exception faite de l'exploitation artisanale des carrières de schiste de Couyer dont la roche sert à la construction des routes et à l'habitat.
Selon l'ingénieur géographe Ogée, les 3275 ha 90 de la commune se ventilent ainsi en 1778 :
Terres labourables 2 607 ha
Prés et pâtures 351
ha
Bois 47
ha
Vergers, jardins 69 ha
Landes et incultes 64 ha
Etangs 5
ha
Le reste forme les espaces bâtis.
Sur toute l'étendue de la paroisse se pratique la polyculture. Les céréales côtoient les cultures industrielles du lin et du chanvre. Les céréales les plus courantes trouvées dans les greniers au début de la Révolution sont le blé noir, le froment, l'avoine, le méteil. Le seigle ne semble pas cultivé pour lui-même.
Le blé noir ou sarrasin est largement en tête et occupe un vaste terroir. Il offre l'avantage de pouvoir pousser dans à peu près toute sorte de terrains et avoir une croissance rapide puisqu'on le sème en mai après les dernières gelées. Mais que d'inconvénients à côté des avantages. La culture nécessite un travail soigné, le sol bien ameubli doit être amendé soit avec des charrées, de la poudrette ou avec des curures de fossé bien mûries. C'est par ailleurs une plante très sensible aux vents « roux » et aux gelées, qui ne fournit que des récoltes précaires. En 1778, les «brouillards » de la nuit et la chaleur du jour ont détruit les grains de façon que l’on n'a pas coupé les « bled », c'est le cas à St Grégoire.
On ne compte guère qu'une bonne moisson tous les 5 ou 6 ans. En année commune, la récolte est de 4 mines par journal soit 112 livres 20.
APRECI DES GRA1NS AU MA RCHE DE
RENNES-
Du Samedi 7 Novembre 1767-
Le boiffeau de bled-noir 26 fols (50 ls)
Dans les 11
ans qui précédent la Révolution, il y eut quatre très bonnes récoltes dont une exceptionnelle en 1779, toutes les
autres années ont été déficitaires ce qui aggrave le sort des ruraux, car pour
beaucoup, c'est la ressource essentielle.
Parfois la récolte suffit à peine pour les semences. En 1785 et 1786 le, blé noir devient rare et
cher alors qu'il est un aliment de base dans nos contrées.
Le froment permet la fabrication du pain de l ère qualité, le pain blanc à fine fleur. Le paysan sème 174 Livres de froment par
journal et en année commune le rapport est de 6 pour 1. Les récoltes ne sont
jamais assurées mais elles paraissent moins aléatoires que celles de
sarrasin. Certaines années sont
franchement bonnes. En 1780 notre
région aurait pu exporter mais la permission est arrivée trop tard à cause de
la guerre ; à cette époque le commerce des grains est contrôlé par l'Etat. Une seule exception, 1785, année où l'on
déclare la récolte insuffisante pour la subsistance, l'année suivante il faut
avoir recours aux grains étrangers.
Le méteil est le mélange de froment et de seigle que l'on sème ensemble. Cette pratique ne s'explique guère car les grains ont un décalage de maturité de 15 jours environ. Le seigle s'égrène sur le sol ou lors du transport. Cette méthode ne présente donc que des inconvénients. De surcroît la mouture de méteil réussit fort mal. Il serait préférable de semer et moudre séparément ces 2 grains et mêler ensuite les farines à part égale. Le méteil donne dit-on un pain savoureux et longtemps frais. Chez le boulanger, il présente un avantage ; il est moins cher.
Avant la Révolution sur le marché de Rennes le pain « Mesléard » ou pain mi-froment, mi-seigle de 6 livres vaut huit sols 5 deniers. Le pain de froment fine fleur ;. le pain de la plus belle qualité coûte 12 sols 10 deniers.
Le
lin est la culture industrielle dominante pratiquée par toute la population paysanne.
La culture a connu un grand essor avant et après la révolution et environ
jusqu'en 1830.
Plusieurs, variétés de lin sont utilisées selon que l'on veuille en extraire de l'huile ou en fabriquer des toiles, de
même que la quantité de semence à répandre sur un espace donné dépend du but
que se propose le cultivateur. Le
proverbe dit : « lin semé clair fait graine de commerce et toile de ménage,
semé dru fait linge fin. » La production est assez régulière dans la décennie qui précède la Révolution. Les
registres de la barrière St Martin de l'octroi de Rennes font état de convois
qui en moyenne d'un chariot, d'une charrette, parfois plus, transportent de la toile, du coutil du fil venant de
Melesse et destiné en majeure partie pour la ville de Rennes ou transitent en «
passe debout » vers Nantes, Paimpont voire Vitré.
Si l'on vend le fil on le travaille aussi car certains laboureurs ou hommes de la terre disent employer un compagnon ou domestique tisserand chargé de fabriquer la toile pour le linge de maison. En 1790, il y a 5 artisans tisserands. Le rouet à filer et le métier à tisser sont les deux outils présents dans les inventaires après décès. Les femmes, semble-t-il fabriquent de la dentelles. « Les fuseliers avec leurs fuseaux plein de fil écru ou brun » attestent de cette activité qui doit en partie correspondre aux articles de « mercerie » faisant l'objet d'un commerce et enregistrés à l'octroi.
Melesse est un pays de pommes et de cidre, le fermier pratique la culture
mélangée. Par exemple une pièce de
terre « ensemencée de gros blé et plantée de plusieurs rangées de pommiers ».
Les celliers renferment de grosses réserves ! Il n'est pas rare de trouver en
un même lieu 3 à 5 fûts à cidre de 3
à 4 barriques, des grandes tonnes, des pipes ou pipeaux. Peu avant la Révolution 3 barriques et quart de cidre valent 34 1 à 36 1 (à
peu près le prix d'un bon cochon) et un peu moins qu'une vache de valeur
moyenne à 40 1.
Nous n'avons pas trouvé trace de vente de cidre, sans doute l'écoulement en était-il local. On buvait la bolée dans les nombreux cabarets de la paroisse ; il est probable aussi que l'on faisait des réserves car la production de pommes était très variable.
Enfin, pour terminer l’inventaire des productions végétales, mentionnons les
châtaignes qui sont un appoint alimentaire voire une ressource. Les états des
récoltes de l’Intendance de Bretagne font figurer cette production, ce qui
atteste de son importance.
Cet article est extrait de
« 10 années de Révolution dans le pays de Melesse »